J'attendais maintenant depuis un moment le début des cours. J'avais mangé très rapidement un pain au chocolat, bu un jus d'orange plutôt bon, et m'étais hâtée de rejoindre directement la salle. Malheureusement elle était encore fermée, et je ne pouvais pas entrer pour nettoyer ma place. Je soupirai doucement et pris mon carnet de dessin, sortant un critérium, je restai debout, ni contre le mur ni au sol, griffonnant. J'avais pris l'habitude de ne rien toucher, de ne pas me salir, de porter des gants et d'éviter le contact avec les autres pour éviter une quelconque crise de panique, et je savais manier debout les crayons. C'était plutôt pratique.

Cependant, au fur et à mesure les camarades arrivaient, je me retrouvais moins seule, et je dus reculer de plus en plus au fond de la file pour éviter que les autres ne me touchent ou ne regardent ce que je faisais. Car s'il y avait un truc que je ne supportais pas, c'était bien que les gens jetaient un œil à mes affaires. Bon, c'est vrai, je ne dessinais pas que des choses très orthodoxes. Mais d'où ils se mêlaient de mes histoires? Après tout, on ne regarde jamais le cahier d'une fille!
Mes joues se mirent à prendre une teinte plus rouge lorsque je constatais que des regards indiscrets tentaient tout de même de zyeuter. Je finis par fermer le cahier et le ranger dans mon sac, le stylo de même. Je n'eus cependant pas le temps de réfléchir au comment du pourquoi, que déjà un fracas retentissant me fis sursauter. Retenant mon cœur d'une main, lequel battait à la folie, je me retournai sur le côté et vis avec stupeur un corps étalé en plein milieu du couloir. Ouch... je grimaçai. Le pauvre quand même. En plus ça doit être vraiment sale parterre.
Ce n'est que lorsqu'il se releva que je remarquai qu'il était notre professeur. Notre professeur.... j'écarquillai les yeux de surprise, tout le monde chuchotait déjà dans la rigolade. C'est vrai qu'il avait l'air un peu spécial, mais ça n'avait pas l'air d'être un mauvais bougre. Tout le monde se mit à entrer. Avant d'être dépassée pour une place, j'entrai dans la foule en priant pour que je n'attrape aucun microbe, et courus aussi vite que je le pus jusqu'à une des places que j'appréciais le plus, vers la fenêtre au deuxième rang. Je sortis directement les lingettes, les éponges et nettoyai autant que je pus. Ensuite, ce n'était qu'une affaire de secondes : je plaçai du papier sur la chaise et la table et m'installai enfin. Bon alors... ce professeur.

Un professeur de philosophie, donc. Plutôt coloré. Si je pouvais sourire, je l'aurais fait, mais je me retins. Il n'était pas du tout moche, au contraire, c'était sa touche de couleur qui me donnait envie de rire. Il était vraiment particulier. Est-ce que ces cicatrices étaient réelles? Si je n'avais pas envie de toucher les gens, j'aurais certainement touché la peau du professeur! Je souris d'un coup, puis attrapai mon cahier pour noter tout ce qu'il disait sur le cours. Vraiment, c'était assez condensé... de l'oral? Je n'aurais certainement pas le courage d'y participer. Ou peut-être m'évanouirai-je avant de pouvoir dire un seul mot. Je fis une moue. Je pense que là le travail personnel va jouer sur ça... ce n'était pas que je n'aimais pas la philosophie, c'était l'une des seules matières que je pouvais suivre sans problème pendant plusieurs jours. Mais parler devant toute une classe alors que j'avais fait exprès de me faire oublier...
J'attrapais une feuille, commençai à écrire les informations demandées. Puis passions. Hm, je vais peut-être occulter les histoires à l'eau de rose comme les otome games, non? J'hésitai, puis l'écrivis quand même. Bon tant pis, au point où j'en suis. Ce n'est pas comme si j'allais mourir. Ou presque.
Pour ce qui était de l'avenir, je ne savais pas vraiment. Peut-être devenir dessinatrice, romancière... oui, c'était bien adapté ça. Après avoir gagné un peu d'argent dans la boutique de mes parents, je ferai ça. Haussant les épaules, je mis ce qui me venais en tête sans plus de conviction et tendis le papier aux autres lorsqu'ils terminèrent. Je voyais ma feuille partir au loin et je rougis. Non, je n'aurais pas dû le mettre. Et s'il lisait à haute voix?... je tournai à la pivoine, préférant me cacher derrière ma frange. Quelle sotte!