La journée se terminait bien. Le professeur nous donna un mot comme quoi il y aurait du soutien en fin de soirée, juste après la pause. Beaucoup avait râlé, bien évidemment. C'était embêtant d'avoir un cours aussi tard alors que les autres sortaient. Pour moi, c'était différent.
Lorsque la sonnerie retentit, tout le monde était déjà sorti. Ou alors certains discutaient avec les camarades d'un quelconque lieu où se rendre. Donc personne ne prévoyait d'aller au cours de soutien? Je soupirai doucement, rangeant mes affaires dans mon sac, puis me levai et pris le papier pour le jeter à la poubelle. Je fis une dernière salutation au professeur et sortit, quelques livres en main. Un cours de soutien? Ils ne nous avaient rien précisé. En plus c'était le soir, heure à laquelle personne n'était vraiment concentrée.
Regardant autour de moi, je me rendis compte que personne ne me suivait. J'allais vraiment y aller seule? Je haussai les épaules, après tout cela m'arrangeait bien, je n'étais pas du genre à apprécier les endroits trop restreints et bondés de monde, les microbes pouvaient rapidement se propager. Je passai tout de même à la cafétéria, en espérant qu'il y ait moins de gens pour pouvoir prendre à boire ou à manger. Mais en voyant la foule qui en sortait, je préférai faire marche arrière et aller directement à la salle.

Là-bas, c'était le professeur qui attendait à l'entrée. Un professeur que je ne connaissais que de nom, celui qu'avait d'autres classes en cours d'histoire. Je n'avais eu Monsieur Stefánson qu'en première année. J'avoue que ses cours étaient géniaux, on ne s'ennuyait jamais. Du moins, il tentait toujours de nous changer la façon de nous l'enseigner, ce qui nous donnait envie de le suivre. En tout cas, pour ma part.
Et puis, Monsieur Stefánson était un bel homme. Le genre de personne devant laquelle on ne passerait pas sans y poser un regard. Parce que le charme nordique avait un peu d'effet sur les femmes... c'était incontestablement puissant, surtout sur les sangs frais. Et plus j'approchais de lui, plus je m'imaginais un scénario sans précédent, avec une héroïne lycéenne et un amour interdit avec un prof d'histoire...

-Monsieur Stefánson?
-Voyons Lely, tu sais depuis longtemps que tu peux m'appeler Alek.
Il s'approcha d'elle et passa le revers de ses doigts sur sa joue, écartant délicatement les cheveux de son visage. Ses yeux étaient posés sur elle, cherchant ce qui se cachait derrière les rougeurs de ses joues.
-Je ne pourrais jamais...
Elle détourne le visage, mais il lui prend le menton pour la forcer à le regarder. Ils se regardèrent dans les yeux, le cœur battant. Pouvait-elle seulement penser à poursuivre entre les bras de son professeur? Comment pourrait-elle vivre avec un fardeau sur le cœur, en se privant de lui?
-Mais … nous n'avons pas le droit...
-Serais-tu en train de me fuir?
Un visage doucereux, impossible de lui dire oui. Elle ne pourrait jamais se défaire de lui.

Je sursautai, les joues rouges. Raaaah mais à quoi je pensais là?! Et en plus, devant le professeur! Je baissai le regard une fois à côté et hochai doucement la tête pour saluer, un petit "bonjour" dissimulé entre mes lèvres, trop honteuse pour lever la tête. C'était ça, mon second problème. Mais bon, personne ne pouvait me blâmer, hein? On a seulement beaucoup de professeurs attirants. Alors seulement imaginer ne fera pas de mal, hm?
Mon second problème... c'était. Ça. Je sortis des lingettes, toujours des gants aux mains, et commençai à nettoyer ma chaise et ma table de fond en comble. Oui... j'étais mysophobe. Je ne pouvais pas m'empêcher de tout nettoyer par simple psychose, et en plus de cela j'avais une crainte maladive pour les microbes et autres pathologies. Même si cela peut se soigner, et que je n'ai cela que depuis quelques années, j'ai tout de même eu du mal avec les gens qui m'entouraient, le pourquoi de ma solitude. Bah, c'est tout aussi bien, je peux penser ce que je veux et écrire des histoires à l'eau de rose toutes sorties de mon imagination! Et on ne peut pas dire qu'on allait me déranger pendant que je rêvais.
Toujours est-il que personne n'était entré quand j'avais terminé de nettoyer. Je soupirai. Personne ne voulait venir... moi j'étais tout de même contente, je pourrais peut-être demander au professeur de l'aide pour les cours d'histoire, cela me permettrais de progresser.
Même si le silence était pesant, je me mis à sortir mes bouquins d'histoire et à les consulter. En attendant, je sortis mon cahier de notes par la même occasion et commençai à tapoter mon crayon sur le papier. Alors...

Non, comment pourrais-je seulement y penser? Dit-elle en fermant les yeux.

Bon. Personne n'était venu. Je soupirai en écrivant, mais rapidement le professeur vint me voir et je dus cacher un peu le papier où j'avais commencé la rédaction du roman sous le livre d'histoire sans que cela soit trop précipité, histoire de n'avoir rien à me reprocher. Si j'avais besoin d'aide? Je ne savais pas vraiment. Peut-être qu'un peu m'aurait aidé pour les examens de l'année prochaine. Je savais que c'était encore loin mais j'étais du genre prévoyante, et autant acquérir les bases dès maintenant. Cependant, sa proximité me mit quelque peu mal à l'aise. Je n'avais pas l'habitude d'être seule ni avec un professeur, ni avec aucun élève, d'autant plus qu'il n'était pas à son bureau, mais juste à côté de moi. Je fis une moue, n'osant pas relever le regard, puis hochai la tête timidement. J'essayais de trouver les mots justes et un sujet qui pourrait m'aider, mais mes yeux se perdirent un moment sur les vikings.

-Je... s'il vous plaît.

Confirmai-je alors, avant de fouiller aussi vite que possible les questions que je pourrais lui poser. Allez Lely, c'était ta chance d'avoir une longueur d'avance par rapport aux autres et ce n'était pas négligeable.
Je commença à prendre les pages et à les tourner, cherchant rapidement du regard ce que nous étudiions et ce que nous allions étudier, pour finalement relever timidement le visage, les joues en feu. Je devais être bien ridicule.

-Euh... est-ce que... je... enfin...

-Monsieur...
-Tu es sûre que tu veux approfondir ce point? Ne préfères-tu pas voir autre chose?
Les joues de la jeune fille se mirent à rougir, elle tenta de détourner le regard mais il lui attrapa le visage.
-Tu me fuis encore une fois.
-N-non...
-Mais à chaque fois que tu le feras je te rattraperai, je t'enfermerai contre moi et avec moi. Tu m'appartiendras...
Les yeux écarquillées, elle resta pétrifiée. Ses lèvres venaient d'effleurer les siennes, et elle n'osa pas le repousser. Heureusement, personne n'était encore entré dans la pièce.

Je secouai vivement la tête, fermant les yeux. Il faut que je reprenne mes esprits, être trop stressée pouvait me faire dire des choses incompréhensibles. J'inspirai puis repris, tête basse cette fois-ci.

-J'aimerais plutôt apprendre un peu plus sur l'histoire du pays... comme on ne le voit qu'en surface je... j'aimerais bien... enfin... s-si vous voulez bien...

Et dans ma tête, j'imaginais à nouveau ce jeu à l'eau de rose, d'une étudiante et d'un enseignant, amour interdit, gêne assurée. Mes joues s'empourprèrent. Pourquoi je pensais à ça, moi? Mais je ne pouvais pas m'en empêcher. Et j'avoue que si même je ne pensais pas vraiment à ce genre de choses, les voir en rêve faisait un bien fou. Oui, je suis une fille quoi.